24 juin 2005 : rénovation du Zoo de Vincennes.
Vers un système évolutif.


Votre serviteur s’est rendu vendredi 24 juin 2005 à la Mairie de Saint-Mandé,
où Geneviève Béraud et son équipe présentaient le projet de rénovation du Zoo
de Vincennes à l’Association-amie d’Arca Majore, « Au printemps des Animaux ».
Compte-rendu au débotté de cette conversation passionnante
et hommage en passant à eux tous qui travaillent
dans des conditions si particulières. Nous insistons là-dessus :
le travail est vraiment de qualité, évolue très vite, de semaine en semaine.

« Finalement, combien va coûter la rénovation ? »
Geneviève Béraud a d’abord confirmé que la rénovation du Zoo exigerait entre 50 et 80 millions
d’euros, qui seront fournis après l’automne, quand auront été trouvés les partenaires d’un futur
partenariat public-privé (le « PPP »). Cette somme sera déboursée par le banquier associé
à l’opérateur de travaux public et au gestionnaire de parc à thème, le loyer payé par l’Etat
(ou « remboursement », pour les intimes) étant étalé sur 10, 15 ou 20 ans.
Arca Majore a calculé que si le privé attend un retour sur investissements de 10 % au minimum
par an, la redevance variera pour le Muséum autour de 8 millions d’euros par an pour 80 millions
d’euros étalés sur 10 ans, autour de 4 millions d’euros pour 80 millions étalés sur 20 ans
(très grossièrement).
Cette fourchette de 50-80 millions d’euros, moitié plus basse que le coût estimé par la
Mission interministérielle pour les grands travaux (de 75 à 150 millions) il y a encore si peu de temps,
est une conséquence directe de la crise de nos finances publiques. Bref, personne n’y peut rien,
mais tout le monde y peut quelque chose.
Le PPP va permettre au Muséum de mener cette rénovation à bien : sans lui, elle ne pourrait exister.

« Nous sommes frappés du fait, qu’officiellement du moins, aucune des équipes extérieures
à l’appel d’offre, ne comptent qu’écosystématiciens, de représentants des écosystèmes
forestiers. Du coup, on se dit que la végétation est décor... »

« Les équipes comptent de fait des zoologues, des vétérinaires, mais vous avez des gens
comme Prescott, ou comme Lernoud, qui ont participé. Mais ici nous recréons des paysages,
nous faisons des évocations de paysages équatoriaux, montagneux, etc. Il n’est pas question
de récréer des écosystèmes, parce que c’est impossible. C’est un message que nous voulons faire
passer, y compris par la mise en scène d’espèces qui ne seront pas forcément spectaculaires...
Personne ne croit à quelquechose du genre Biosphère au Zoo de Vincennes.»

« Ne convient-il pas de prévoir dans le bâti du zoo futur une capacité évolutive pour tenir
compte des mutations nécessaires de l’outil de recherche ? »

La réponse de Mme Béraud est forte, positive, sans ambiguïté. Les investissements continueront
même après cette rénovation, et « c’est pourquoi nous demandons à nos prestataires des aménagements souples », un bâti qui soit « le plus léger possible ». Notre réflexion : cela permet
aussi de faire baisser le devis et c’est tant mieux.
Nos craintes ont d'abord été les suivantes : comme consultant, je sais que les consultants se réfèrent aux documents de base, donc aux 10 lignes du texte de l’appel d’offre et au document confidentiel produit
à leur intention par le Muséum sous le titre Projet de rénovation du parc zoologique de Paris,
Les principales orientations, document I
[le document II étant le plan de collection].
Conclusion : nous pensions que si rien n’apparaissait dans un document écrit stipulant clairement
aux cabinets qu’ils doivent mettre des structures évolutives, ils ne le feraient pas.
A ujourd’hui, nous sommes rassurés sur ce point,

« Y-aura-t-il au moins deux serres » ?
« C’est aux équipes de consultants de le dire », nous a-t-on expliqué.
Il y aura moins d’animaux emblématiques (type ours, panda... certes mort depuis 1999) attirant
le public, a noté à ce sujet l’assistance. « Mais, a-t-on ajouté dans le public, s’il y a des paysages
exotiques à voir même l’hiver, nous accourrons ».
Quand nous avons interrogé les partenaires pressentis pour le PPP, avec lesquels il nous arrive
d’échanger des idées de manière informelle, leur remarque a été qu’avec une serre de 5 000 à
8 000 m2, comme indiqué dans le document confidentiel cité en infra, il n’y aurait qu’un
paysage exotique à voir l’hiver.
Cependant, des gestionnaires de Zoo nous ont ensuite dit que cela importait peu.

Ces serres pourront-elles être closes par rapport aux échanges atmosphériques ?
La réponse de l’équipe est donc entièrement négative, car on ne maîtrise pas les techniques de reproduction des systèmes entièrement clos.
Arca Majore pense en outre qu'on ne peut faire courir de risques vitaux à des « collections »
vivantes. Notre question est en fait de de nature industrielle et a un rapport indirect avec le droit
des brevets : malgré les difficultés que cela présuppose, Arca Majore se bat pour une extension
future des serres, leur intégration à un micro-système océanique et pour leur fermeture
à l’atmosphère (mais non au public, afin d’accroître la difficulté)...
Ce n’est pas Biosphère II, ce n’est pas un écotron, c’est autre chose...
Si 99 % des scientifiques du Vivant n’y croient pas, le reste, qui ne sait pas que
c’est impossible, le fera (pour citer Churchill) ; et il le fera aux Etats-Unis, préfigurant
les jardins spatiaux qui tourneront un jour en orbite au-dessus de nos têtes.
La Nasa travaille déjà sur ce sujet et nous en rendrons compte dans nos prochaines livraisons
d’articles. Sur la base des techniques commençant à être connues et qui seront développées,
il y a x brevets à prendre, et les retombées de la recherche spatiale et para-spatiale n’ont plus
à être démontrées. Il n’est pas besoin de dire que si le Muséum ne le fait pas d’autres le feront,
espérons en France et en Europe.
C’est donc pourquoi nous tenons tant à la notion de zoo évolutif et qu’elle figure en toutes
lettres dans les missions des consultants. Rien n’empêchera cependant les équipes scientifiques
de s’appropirier un jour ce thème. Mais cela signifierait partir des collections pour aller vers
l’écosystème clos, alors qu’en fait il faudra certainement faire l’inverse.

« Le Zoo sera-t-il écologiste ? »
Geneviève Béraud a insisté sur le recyclage des eaux, des déchets, la norme de haute qualité
environnementale, le bâti non massif. Nous applaudissons à cela.
L’équipe nous a fait aussi part de son souhait d’extension du zoo vers le lac Daumesnil.
Or, nous pensons que ce lac (voir la page qui lui est consacrée dans notre site),
est un double enjeu, à la fois social et financier :
– social, car y développer la théorie des machines biologiques de John Todd (voir le chapitre
de notre site sur le Lac Daumesnil) permet de créer une succession de micro-paysages créateurs
de beauté et... une plage baignable dès les beaux jours... et donc d’intéresser, à travers les Parcs
et Jardins de la Ville de Paris, Yves Contassot qui manque de crédits pour rénover le Bois de
Vincennes, et donc... le lac Daumesnil, récipendiaire de toutes les stérilités du monde industriel.
– en attirant ainsi les foules vers un complexe lac-zoo, dans l’enceinte duquel on trouvera des
buvettes, des commerces, des restaurants, on valorisera la concession, et donc les revenus
vers ce qui est le premier service public de protection de la biodiversité.
Problème : tout cela ne figure pas dans le document confidentiel auquel nous ne cessons de faire
référence. Nous pensons que les partenaires potentiels d’un PPP regretteront l’absence d’intégration
Zoo de Vincennes-partie baignable du Lac Daumesnil, au moins sous le forme d’un billet commun...
C ar en effet se pose la question du billet : global, ou avec tarif minimal dans l’enceinte avec
paiement ensuite aux pavillons ou aux zones spécialisées, comme au Tivoli ou au Jardin d’acclimatation
de Boulogne.
En ce cas, on résout le problème de la revisite, majeur pour tout parc à thème...

En conclusion
S’il est vrai que le travail est bien mené, pourquoi le Muséum n’associe-t-il pas à la réflexion
et au Comité d’experts les associations qui connaissent le terrain si spécifique
du Bois de Vincennes ?
Pourtant, dans le travail concret de dénombrement et de protection de la nature, le tissu associatif
fournit déjà au Muséum le terreau des « ressources » humaines indispensables, et ce bénévolement :
un bel exemple est la Ligue de protection des oiseaux, dont le Président, Alain Bougrain-Dubourg,
co-dirige avec pertinence le Comité des experts.

Pierre-Gilles Bellin, Président d’Arca Majore