Développement durable et éco-industries

En Allemagne où, par-delà les clivages idéologiques, l’opinion est très sensibilisée aux questions
de l’environnement, le concept du développement durable a une longue tradition. Bien avant l’entrée
de cette notion dans le «jargon» politico-économique, de multiples efforts avaient été entrepris
dans ce sens. Deux phases peuvent être distinguées : la première, axée sur la question de l’éco-efficience,
du tri sélectif et du recyclage, touche aujourd’hui à ses limites. L’Allemagne est alors entrée, en parfaite
concertation internationale, dans une deuxième phase, plus axée sur le défi des énergies propres,
voire des énergies renouvelables. La notion de développement durable va t-elle au-delà de
cette «dimension verte» en Allemagne ? Quel est le rôle joué par les industriels, particulièrement
les éco-industries, et quelles sont les retombées en matière de qualité de l’environnement ?


Six champs pour une politique de développement durable
Par le truchement de deux rapports de l’Office fédéral de l’environnement
(Umweltbundesamt, UBA) publiés en 1997 et 2002, le gouvernement allemand formule six champs
d’intervention pour une politique orientée selon le principe du développement durable : climat et énergie,
production alimentaire, trafic et infrastructure, industrie, ressources naturelles et tourisme.
Les premiers résultats concrets de cette politique sont déjà visibles : il s’agit de l’encouragement
et du développement d’énergies renouvelables, de l’introduction de l’écotaxe, de la fin programmée
de l’énergie nucléaire et de la réorientation « bio » de la politique agricole (ökologischer Landbau).
En revanche, bien que l’augmentation de l’efficacité ait permis de baisser la consommation de ressources
par unité produite (l’Allemagne est un des rares pays qui a pu dissocier le lien fatidique entre croissance
économique et consommation de ressources), la consommation totale de ressources continue
de progresser.

Le développement durable, un concept ancien
La notion de développement durable est née dans la sylviculture prussienne du XVIIIe siècle.
A l’origine, elle impliquait une exploitation des ressources naturelles respectueuse de l’avenir
des rendements agricoles et forestiers. La notion «moderne», formulée pour la première fois aux
Nations Unies par la commission Brundtland de 1987, y ajoute – en parfaite adéquation avec
la philosophie protestante - le concept d’équité intergénérationnelle : l’écologie, l’économie et
la société forment une unité qui doit permettre aux générations futures de profiter des mêmes
possibilités de développement que les générations précédentes. En 1992, 170 pays se sont
déclarés partisans de ce principe lors de la conférence des Nations Unies à Rio de Janeiro.
L’Agenda 21 issu de cette conférence développe un programme d’action pour le XXIe siècle,
notamment dans le domaine de la protection du climat qui représente probablement le facteur
le plus consensuel face à un concept qui reste malgré tout assez flou.

Création d’un Conseil pour le développement durable
Un récent rapport de l’OCDE (2002) souligne que, malgré l’identification des différents champs d’intervention, l’Allemagne manque encore d’une stratégie à plus long terme permettant un véritable développement durable.
Cette critique de l’OCDE peut s’expliquer par l’éclatement des compétencesen matière
environnementale. En effet, le niveau fédéral est chargé des questions de déchets, de lutte contre
la pollution atmosphérique et du bruit, ainsi que de la sécurité nucléaire et des substances chimiques ;
les Länder s’occupent de l’eau, du sol, des réserves naturelles et de la gestion et prévention
des catastrophes, et les communes ont à charge l’urbanisme, l’approvisionnement en eau
ou le traitement des eaux usées.
C’est pour remédier à cette séparation des responsabilités et pour rendre moins délicat le
développement d’une stratégie plus globale que vient d’être constitué, auprès du gouvernement fédéral,
un Conseil pour le développement durable (Rat für nachhaltige Entwicklung).

Développement durable : au cœur du «modèle rhénan»
Multiple et diffus dans ses formes d’expression, le concept de développement durable n’en est pas
moins solidement ancré dans la culture allemande dont il l’est l’un des pivots.
Peut-être le caractère protéiforme de ses manifestations, qui interdit toute lecture univoque en termes
de «politique», est-il la véritable raison qui motive le constat de l’OCDE : comment un trait culturel
et structurel à la fois, présidant à l’organisation de l’ensemble des activités humaines, peut-il se ramener
à une «stratégie» identifiable et quantifiable ?
Dans un Etat qui, au fil des millénaires, a construit son unité sur le respect des particularismes,
et dont sa situation géographique fait un lieu de passage, le partage des ressources et la vie en bonne
intelligence avec le voisinage sont une nécessité absolue. Cette acception de la relation entre l’individu
et son environnement se fonde ensuite sur la tradition philosophico-religieuse allemande, telle que la véhiculent toujours les notions de « Um-welt » (environnement ; littéralement : le monde qui nous
entoure) ou de « Mit-mensch » (concitoyen ou frère ; qui renvoie à la responsabilité de l’individu par rapport à la société). De là, il n’y a qu’un pas vers une forme « du-rable » de régulation économique
et sociale : le développement durable est au cœur même du système de gouvernance tel qu’il
caractérise le «modèle rhénan».

Développement durable et industrie
Si la prise en compte du développement durable ne date pas d’hier dans un pays marqué par l’urbanisation et l’industrialisation, où le développement des pratiques « propres » relève d’une notionde survie toute naturelle, elle s’est nettement accélérée depuis le 1er choc pétrolier et « l’écologisation »
de la scène politique allemande. Le développement durable a d’abord été mis en œuvre dans l’industrie,
et se manifeste à trois niveaux.
Le premier est celui des industries classiques qui, comme la chimie, l’automobile, mais
aussi les industries financières ou touristiques, internalisent le développement durable,
soit à l’aide de pratiques « propres » comme l’éco-efficience (Kreislaufwirtschaft) et le tri sélectif
en interne, l’audit écologique (Ökoaudit) ou la sécurité du travail, soit encore à l’aide des technologies
issues des deux autres niveaux.
Les deux derniers concernent les industries productrices de technologies et de savoir « verts »
(recyclage, protection contre le bruit, réduction des émissions atmo-sphériques, traitement des eaux
usées, etc.), et le secteur des industries productrices d’énergies renouvelables.
Sur ces marchés, l’Allemagne occupe une place de leader européen (voir REA 38/98). En Europe,
le marché de l’environnement est estimé à 125 milliards € en 2000, dont environ un tiers est couvert
par l’Allemagne. Le marché est donc significatif. Mais longtemps également placée première mondiale
(devant les Etats-Unis), l’Allemagne a récemment été reléguée à la deuxième place.


Part de marché mondiale des éco-industries des principaux pays
1989 ....1991 ...1993 ....1995 ....1997
Allemagne ...20,2 .....19,5 ....17,7 .....18,0 ......16,5
Etats-Unis ...16,5 .....17,3 ....18,2 .....17,5 ......20,6
Japon .........11,8 .....11,3 ....12,5 .....13,8 ......12,3
Italie .............9,1 .......9,2 ....10,0 .......9,3 ........9,0
Royaume-Uni 7,9 .......7,3 ......6,6 .......7,0 ........7,5
France ..........6,9 .......7,2 ......7,0 .......6,9 ........6,6

Source : Niedersächsisches Institut für Wirtschaftsforschung, 2000

Protection de l’environnement : le fief des PME
L’Allemagne compte environ 11 000 entreprises qui offrent des biens et services liés à la protection
de l’environnement, essentiellement des PME très spécialisées, productrices de brevets et exportatrices.
En 1997, le volume de leurs exportations s’élevait à environ 20 milliards €, soit 4,6 % de l’ensemble
des exportations allemandes. Soutenues pour l’instant surtout par des aides individualisées,
mais freinées en même temps par une technologie parfois trop exigeante et trop onéreuse pour les
clients étrangers, environ 10 % des entre-prises du secteur seulement s’engagent dans l’exportation.

Eco-industries : un important gisement d’emplois
Les éco-industries représentent aujourd’hui un gisement important d’emplois : pour 2000, on estime
à environ 1,1 million (15 % de plus qu’en 1994) le nombre d’emplois directement ou indirectement liés
à la protection de l’environnement.
Mais elles jouent aussi un rôle fondamental dans la reconversion industrielle, comme le montre l’exemple
de la Ruhr où les éco-industries prennent la troisième place, directement derrière la chimie et l’industrie
métallurgique, mais devant l’automobile et l’industrie minière. Très concentrées dans le domaine de
la gestion et du traitement des déchets (environ deux tiers du CA et des emplois), elles représentent
représentent un facteur important dans la restructura-tion de cet ancien « pays noir » et le développement
d‘une nouvelle image.

Le développement des énergies renouvelables
L’Allemagne fait partie des pays où les ressources énergétiques ne sont pas abondantes. Si le pays
peut encore compter sur ses réserves de lignite (seule source d’énergie à ne pas être subventionnée),
le développement d’énergies renouvelables est ainsi une priorité nationale.
Compte tenu de l’annonce de la sortie du nucléaire et de l’ambition de réduire massivement les émissions
de CO2, le gouvernement allemand s’est engagé à doubler d’ici 2010 la part de ces énergies
(l’objectif est fixé à 12,5 %). En 2001, la production d’énergie de sources renouvelables s’élevait
à environ 36 milliards de kWh (6,4 % de la pro-duction brute d’électricité). Plus de la moitié de cette
production est assurée par des sources hydrauliques, mais ce niveau est proche de la saturation.
Doubler la part des énergies renouvelables ne peut ainsi que venir d’autres sources, notamment
des éoliennes et de l’énergie solaire.


Production d’électricité par des énergies renouvelables
(en milliards de kWh) *

1990 ...1996 ...1998 ...2000 ...2001 .....2001
Eau ...................................14,6 ....16,2 ....17,3 ....21,7 ....19,8 ..(3,5 %)
Vent ....................................0,0 .......2,0 .....4,5 ......9,5 ....11,5 ..(2,0 %)
Biomasse, déchets ...............4,1 .......2,9 .....3,5 ......4,3 ......4,9 ..(0,9 %)
Photovoltaïque ......................0 .........0,01 ...0,02 ....0,03 ....0,05 (0,0 %)
Total énergies renouvelables..18,8......2,1......25,3.....35,5....36,3..(6,4 %)
Production brute d’électricité.............549,9..551,6...553,6..563,1..570,0
Source : Verband der Elektrizitätswirtschaft – VDEW, DIW 9/2002. *)
Données provisoires pour 2001 ;
Dernière colonne : part dans l’ensemble de la production d’électricité


De larges subventions
Afin d’atteindre son objectif ambitieux, l’Allemagne a recours aux subventions, prévues par la
loi sur les énergies renouvelables (Erneuerbare-Ener-gien-Gesetz, EEG), entrée en vigueur le
01-04-2000, et la loi de promotion des échanges thermiques (Kraft-Wärme-Kopplungs-Gesetz,
KWK, 12-05-2000).
La première prévoit des prix administrés échelonnés qui s’élèvent à environ 0,7 € par kWh pour
l’hydraulique, à 0,9 € pour l’éolienne et jusqu’à 0,5 € pour le solaire. L’EEG est surtout critiquée
pour son intervention dans la libre fixation des prix et le risque, en subventionnant à long terme
certaines indus-tries, de freiner l’innovation.
L’alternative à ce concept pourrait consister à agir sur les quantités. L’organisation d’un marché
de certificats négociables (à l’instar de ce qui est prévu au niveau de l’Union européenne pour les
«permis de polluer» et de ce qui est aussi partiellement prévu pour la KWK), basé sur des quotas
concernant l’énergie renouvelable et auxquels les industriels s’engagent, pourrait augmenter l’efficacité
économique ; l’intérêt particulier des industriels serait alors d’investir dans des techniques «propres».

Sortie du nucléaire : les contradictions allemandes
Le 11 juin 2001, le gouvernement allemand signait avec les compagnies électriques un accord,
dit de consensus, sur la sortie du nucléaire ; il limite la durée de vie moyenne des 19 centrales à 32 ans
en moyenne et arrête la construc-tion de nouveaux réacteurs.
La nouvelle loi sur le nucléaire, entrée en vigueur au printemps 2002, entérine le passage d’une
promotion du nucléaire à un système qui ne garantit que la sécurité du fonctionnement des centrales
existantes et organise un centre d’entreposage intermédiaire des combustibles usés.
Mais elle n’est pas irréversible (en cas de changement de gouvernement à l’automne).
Certaines contradictions dans la position actuelle pourraient en effet motiver une telle décision.
Ainsi, environ la moitié du budget fédéral prévu pour la R&D continue d’être affectée au nucléaire
(non seulement pour le démantèlement, mais aussi la fusion nu-cléaire et la question des réacteurs
du futur). Par ailleurs, l’annonce de la sortie du nucléaire risque d’augmenter la dépendance
énergétique d’importations étrangères, par exemple du gaz russe, ce qui entre en conflit avec
l’ambition de réduire les émissions de CO2. Enfin, le pays perdra sa maîtrise de l’ensemble
du cycle du combustible, le rendant ainsi tributaire de partenaires étrangers.

Eoliennes : le tiers de la capacité mondiale
Le secteur des éoliennes est parmi les plus dynamiques et occupe la première place dans
le développement d’énergies renouvelables en Allemagne. En 2001, on y comptait 11 438 éoliennes,
qui correspondent à une puissance de 8 754 MW ; c’est environ un tiers de la capacité mondiale
et la moitié de la capacité européenne. Elles sont situées surtout à proximité des côtes,
dont 2 079 nouvellement installées en 2001.
Leur rendement potentiel est estimé à 16 kWh par an par l’Institut allemand des éoliennes
(Deutsches Windinstitut – DEWI), soit environ 3 % de la production brute d’électricité.
Les disparités régionales sont néanmoins énormes : dans le Schleswig Holstein, par exemple,
le taux est de 25 %, il est de 19 % dans le Mecklembourg.

Une marge de croissance bientôt épuisée ?
Début 2000, le secteur comptait environ 20 000 emplois ; la tendance est à la hausse, surtout
si la part des exportations (actuellement de 20 %) continue d’augmenter.
La puissance des nouvelles installations est en croissance continue elle aussi. Aujourd’hui, elle est
à un peu plus d’un MW en moyenne, et on prévoit déjà de l’étendre à 5 MW. L’avenir semble donc
rose pour les éoliennes. Mais on évoque déjà une insuffisance d’emplacements, voire une stagnation
du secteur dès 2004, à moins que la production off-shore ne le re-dynamise.
L’Union européenne estime que 15 % de la consommation d’électricité pourraient être couverts
par des parcs off-shore en 2030. Néan-moins, de nombreuses questions restent ouvertes ;
par exemple sur l’emplacement qui résulte d’un arbitrage entre proximité des côtes et exigences
de la pêche, des plates-formes de forage et du trafic maritime. A moyen terme, le secteur pourrait
rencontrer des difficultés liées aux coûts élevés d’installation par rapport au taux de remboursement,
certes garanti, mais assez faible tel qu’il est fixé dans l’EEG.
Enfin, l’énergie par éolienne a aussi ses détracteurs, qui dénoncent les nuisances sonores,
«l’aspergisation» des paysages, ainsi que l’effet «disco» dû au jeu entre l’ombre et le soleil
suite à la rotation, sans par-ler des risques liés à la faible résistance au vent des ins-tallations.

Engouement pour les valeurs environnementales
Mais pour l’instant, le dynamisme du secteur peut se lire aussi à la bourse, où le Neuer Markt
compte actuellement six entreprises ayant leur base dans l’industrie éolienne : Energiekontor,
P&T Technologie et Repower ; ainsi que Nordex, Plambeck et Umweltkontor, toutes trois cotées
au Nemax50. Cette offre est complétée par une gamme très développée de SICAV et de FCP investis
dans l’éolien. Le même constat vaut pour les autres secteurs d’énergies propres, mais aussi pour celui
du traitement des déchets et du recy-clage, ainsi que pour les entreprises intégrant l’éco-efficience
et des critères éthiques dans leur production. La récente réforme des retraites, qui introduit une dose de
capitalisation, compte explicitement l’écologie, l’éthique et le social parmi les critères d’éligibilité des fonds.

Fonds d’investissement « vert » : 2,4 milliards € en 2001
En 2001, les fonds d’investissement « vert » ont pu augmenter leur volume à 2,4 milliards € ; malgré
une progression de 50 %, cela ne correspond néanmoins qu’à 1 % du niveau américain. Le secteur
est en pleine croissance, malgré le revers récent constaté par la faillite de la première banque verte
allemande : l’Ökobank fondée en 1988 et spécialisée dans le financement de projets d’investissement
écologiques (notons que la Bankaktiengesellschaft Hamm s’est portée acquéreur, promettant une reprise
partielle des activités écologiques). Malgré quelques erreurs de management dans la dernière phase,
les eco-banquiers (sobriquet : « banquiers en baskets ») incarnent parfaitement une mentalité qui vise la
diffusion générale du développement durable dans des domaines qui ne sont pas directement concernés
par l’écologie. Le succès de l’Umweltbank AG de Nürnberg prouve d’ailleurs que le concept n’est pas
révolu. Sur la base de leur expertise verte, ces institutions ont plus qu’une carte à jouer sur un marché en
croissance, par exemple en développant des produits innovants pour le financement du développement
durable dans toute sa diversité, distribués ensuite en partenariat avec une grande banque privée
ou publique.

Quels effets sur la qualité de l’environnement ?
Air : l’Allemagne en pointe, mais…
Le niveau d’industrialisation et d’urbanisation de l’Allemagne exigent des efforts particuliers
pour préserver la qualité de son environnement. Dans le domaine de l’air, le pays a pris très tôt pris
des mesures visant une maîtrise progressive de sa qualité. Initialement, elles étaient orientées davantage
vers la réduction des émissions de dioxyde de souffre (pour les Länder de l’Ouest, les émissions de SO2
sont passées de 3,75 millions de tonnes en 1970 à 0,94 millions de tonnes en 1990) et des poussières
émises par les centrales thermiques.
Depuis les années 90 et sous l’impulsion de la coopération internationale, la lutte contre les émissions
de CO2 occupe le devant de la scène. Le gouvernement fédéral poursuit des objectifs ambitieux
en la matière. Ainsi, il a récemment réaffirmé sa volonté de réduire d’ici 2005 les émissions de CO2
de 25 % par rapport à 1990.
Par ailleurs, il s’est engagé à réduire l’émission des gaz à effet de serre de 21 % d’ici 2008-12.
En 1994, l’Allemagne fut le premier Etat au monde à s’engager dans la réduction des CFC. (chlorofluorocarbones). Dans le do-maine de la pollution automobile, l’Allemagne a déjà
progressivement introduit l’essence sans plomb et le pot catalytique qui sont devenus les références
européennes dans la matière.

Emissions de CO2 : la baisse ralentit *
1990 .................1993 ................2000 ................2001.......
Hydrocarbures ...299,2 ..30,3 .....330,2 ...37,0 .....294,3 ...35,0 .....299,1 ...35,0
Gaz .....................158,1 ..16,0 .....166,7 ...18,7 .....193,2 ...23,6 .....201,4 ...23,6
Houille ..............182,4 ..18,5 .....174,9 ...19,6 .....175,9 ...20,9 .....166,4 ...19,5
Lignite ..............343,5 ..34,8 .....218,8 ...24,5 .....174,9 ...20,8 .....184,3 ...21,6
Sources diverses .....4,0 ....0,4 .........2,3 .....0,3 .........2,9 .....0,3 .........3,1 .....0,4
Total ...............987,2 ..100 ........892,9 .100 ........840,8 .100... .....854,3 .100...
Source : DIW, 8/2002. *
Première colonne : millions de tonnes
S econde colonne : en % du total
2000 et 2001 : données provisoires


… des objectifs trop ambitieux
Globalement, on constate que la baisse des émissions réalisée entre 1990 et 2001
(153 millions de tonnes) se répartit surtout sur les années de 1990/93 (effondrement de l’économie
de l’ex-RDA et modernisation de ses modes de production).
Depuis, les émissions ne se réduisent plus qu’à un rythme de 4 millions de tonnes par an. Afin
d’atteindre le but fixé pour 2005, les émissions devraient baisser 4 fois de suite d’environ 25 millions
de tonnes. La perspective est certes meilleure pour l’échéance 2008/2012. Tous les objectifs
ne seront donc pas atteints, mais les émissions de CO2 auront été nettement réduites durant les
années 90. Ce succès est dû à des efforts considérables dans l’industrie, les maillons faibles restant
les ménages, le trafic automobile et la navigation aérienne.

Eau : privatisation en et exportation du savoir-faire allemand
Afin de préserver la qualité de l’eau, des réglementations sévères ont été instaurées depuis
les années 50. Elles débouchent par exemple sur un traitement systématique des eaux usées,
ainsi que des mesures dans les entreprises in-dustrielles. La qualité de l’eau du Rhin, qui s’est
très sensiblement améliorée, peut être citée à titre d’exemple.
Néanmoins, dans de nombreux cas, la situation de l’eau n’est pas encore satisfaisante. Mis à part
le problème de la coopé-ration transfrontalière, l’amélioration supplé-mentaire de la qualité de l’eau
touche aujourd’hui ses limites techniques et éco-nomiques. L’utilisation de techniques « propres »
comme les circuits internes d’eaux dans l’usine et le remplacement des produits dangereux par
des substituts moins polluants paraît dès lors prometteuse.
Enfin, le secteur de l’eau, un des derniers bastions de la gestion publique, est aujourd’hui confronté
à un processus de libéralisation du marché. Le débat entre partisans d’une gestion plus efficace
et ceux qui craignent une dégradation de la qualité s’est récemment ouvert en Allemagne.
Entre-temps, les industriels ont déjà réagi, comme le montrent les activités de RWE qui a acquis
Thames Water afin de renforcer sa compétence dans le secteur de l’eau, visant ainsi non seulement
le marché allemand, mais aussi celui de l’Europe de l’Est avec son potentiel énorme en matière
d’éco-industries.


En conclusion
LE DEVELOPPEMENT DURABLE va aujourd’hui bien au-delà du seul facteur environnemental.
Le gouvernement allemand prévoit de présenter en septembre prochain au sommet mondial
du développement durable à Johannisburg une stratégie basée sur 21 indicateurs, qui vont de
la protection du climat jusqu’au tourisme en passant par l’endettement public (la soutenabilité de
la dette, aussi, relève du développement durable).
Mais pour l’instant – et malgré la tradition spécifique du développement durable, les activités dans
le domaine restent pour l’instant encore trop liées à la question verte. Son application se fait par
l’impulsion donnée conjointement par les autorités publiques et par l’industrie qui, non seulement
a pris très tôt ses responsabilités, mais a aussi rapidement identifié l’enjeu économique de la question.
Ces efforts ont porté leur fruit dans le domaine des éco-industries où l’Allemagne est championne
d’Europe.
Ils se sont révélés payants également à une échelle plus globale, prouvant que la croissance
conjointe entre développement économique et dégradation environnementale n’est pas une fatalité.
Mais il montre aussi qu’il s’agit bel et bien d’un choix de société sans lequel l’application
du développement durable reste une ambition trop floue et sans ancrage dans la société.
Voilà pourquoi on s’efforce aujourd’hui en Allemagne à assurer une meilleure coordination des
différentes activités, à concilier les engagements de Kyoto avec les contradictions de la politique
énergétique et, surtout, à renforcer le volume des fonds dédiés au financement de l’innovation,
comme le prévoit le programme d’investissements du futur (Zukunftsinvestitionsprogramm).

Indications bibliographiques
– DEML Max, « Ökobank, quo vadis ? », BUNDmagazin, 4/2001; et « Kauf Dir ein Stück Öko-Wirtschaft », BUNDmagazin, 4/2000
– DIEKMANN Jörg, « Förderung der Windernergie erfolgreich », DIW-Wochenbericht, 9/2002
-- NEU A. D., « Eine Zwischenbilanz zum Einsatz und zur Förderung erneuerbarer Energie in Deutschland »,
Kieler Diskussionspapiere, n° 363, 2000
– OCDE, Examens des performances environnementales : Allemagne, Paris, 2001 ;
et Governance for sustainable Development : Five OECD case studies, Paris, 2002, (www.oecd.org)
– Umweltbundesamt, Nachhaltige Entwicklung in Deutschland – die Zukunft dauerhaft meis-tern,
Erich-Schmidt-Verlag, 2002, (www.bmu.de)
– WUDTKE Marita, « Offshore Windkraft », BUNDmagazin, 4/2000
– ZIESING Hans-Joachim, « CO2-Emissionen im Jahre 2001 : vom Einsparziel 2005 noch weit entfernt »,
DIW-Wochenbericht, n° 8/2002. ?

Markus Gabel